Votre peau vous appartient, votre tatouage est encré sur votre peau, donc votre tatouage vous appartient. CQFD ? Pas si sûr ! Le site indépendant américain The Conversation a publié en aout 2016 un long article intitulé Who owns your tattoo? Maybe not you. L’association Tatouage & Partage l’a décrypté pour vous.
Shontavia Johnson enseigne la propriété intellectuelle dans le département de droit de la Drake University de Des Moines, dans l’Iowa. L’auteur de l’article part d’un constat : de plus en plus de tatoueurs font valoir leurs droits d’auteur sur leurs œuvres ornant la peau de célébrités. C’est le cas aux États-Unis, mais également hors des frontières du pays de l’Oncle Sam.
Pour étayer ses propos, Shontavia Johnson multiplie les exemples en commençant par un cas croisé dans le NBA, la principale ligue de basket-ball nord-américaine. Les tatoueurs ayant encré les superstars Kobe Bryant et Lebron James ont récemment porté plainte devant le tribunal de New York, au motif que les éditeurs du jeu vidéo de basket NBA 2K avaient reproduit les tattoos desdits joueurs sur leurs avatars virtuels. Pour eux, il s’agit là d’une utilisation commerciale de leur œuvre de nature frauduleuse puisqu’aucun droit d’auteur ne leur a été versé.
Autre exemple qui parlera autant aux cinéphiles qu’aux amateurs de boxe : le cas Mike Tyson. "Iron Mike" a conclu un arrangement financier avec le studio de production Warner après que celui-ci a utilisé son emblématique tatouage facial pour en parer l’un des personnages du film Very bad trip.
Et l’auteur de citer d’autres illustrations de ces sursauts d’orgueil, de David Beckham et son ange aux ailes déployées au propriétaire d’un café new-yorkais qui, ayant utilisé sur sa vitrine un dessin de sa propre main sur laquelle figurait un tatouage parodiant le célèbre I [cœur] NY (pour "J’aime New York"), s’est vu juridiquement menacer par le département d’État de New York pour violation de marque.
Le plus inquiétant avec le sujet abordé par Shontavia Johnson, c’est qu’il transcende les simples frontières américaines. En France, on relève un cas de jurisprudence semblable aux exemples précités, et il concerne un tatouage… arboré par Johnny Hallyday. Le tatoueur à l’origine de cette pièce a déposé son dessin à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) à la fin des années 1990 et, depuis, toute commercialisation de la reproduction du tatouage de notre Johnny national doit au préalable nécessiter l’autorisation de son créateur.
Ces exemples évoqués, que dit finalement le Code de propriété intellectuelle ? Réponse : il prévoit que des droits d’auteur protègent "toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination". De fait, "l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété intellectuelle exclusif et opposable à tous". Conclusion : le fait de porter un tatouage ne vous permet donc pas d’en autoriser la reproduction !