La parole aux tatoueurs : Manuella de Kalie Art Tattoo

  
 

Votre association Tatouage & Partage ne prend pas de vacances et vous propose, comme à son habitude, d’écouter le témoignage d’un tatoueur français. Cette semaine, notre tatoueur est une tatoueuse : Manuella, du studio parisien Kalie Art Tattoo. Entrée dans le milieu, ambitions artistiques, statut du tatoueur et formation : la jeune femme se confie, face à la caméra de Pounti Prod.

Tatoueurs, ma parole 5 : Manuella - Kalie Art Tattoo

Vidéo © Pierrick Robert & Pierre-François Loiseau / Pounti Prod'

Premiers contacts

Son premier contact avec un dermographe (mot fraichement entré dans le dictionnaire, pour la plus grande joie de votre association de tatouage), Manuella le vit grâce à sa maman, professeur d’esthétique et, de fait, détentrice dudit sésame. La petite curieuse pique l’outil pour se faire ses premiers tattoos… à 14 ans. Vous avez dit précoce ?

C’est ensuite son petit ami qui lui offre une véritable machine à tatouer : grâce à celle-ci, Manuella commence à tatouer son entourage, sans pour autant négliger ses études – pour elle, comme elle le confie à votre association de tatouage, le tattoo n’est encore qu’un à-côté.

Manuella parle ensuite d’une « redécouverte » du tattoo, arrivée à l’âge de la maturité. Tandis qu’elle suit des études artistiques, la jeune femme prend conscience du fait que le tattoo peut être technique à certains moments, artistique à d’autres.

« C’est un médium d’expression comme pourrait l’être la peinture ou la vidéo », observe avec finesse la jeune femme au cou tatoué.

Interrogée sur le statut du tatoueur par votre association de tatouage, Manuella tranche : pour elle, le tatoueur est avant tout un artisan. Pourquoi ? Parce qu’il répond à une demande : un client entre dans sa boutique avec une requête et c’est son devoir à elle, en tant que tatoueuse, de répondre avec justesse à cette demande.

Manuella utilise également l’expression « collaboration » : il s’agit de ces situations où le client donne une ligne de direction, tout en laissant un grand champ de liberté au tatoueur, liberté pouvant « bifurquer sur l’artistique ». Notre tatoueuse parisienne parle là d’un « travail à deux d’expression », sans jamais oublier que « l’autre est le support de ta complète imagination et de ton art ».

Particulièrement prolixe sur le statut du tatoueur – et ce n’est pas pour déplaire à votre association de tatouage –, Manuella évoque la formation d’hygiène qu’elle a suivie à l'École Française de Tatouage. « Là-bas, ils forment les tatoueurs pour 2 000 € », raconte-t-elle, en mentionnant des stages « espacés ».

Pour Manuella, on peut acquérir la technique du tatouage dans une école : mais il y a des choses pour lesquelles l’éducation est vaine.

Le discours de Manuella sur l’apprentissage est sans équivoque : « Quand on est apprenti, le problème est qu’on a qu’une seule vision du tatouage : celle du maître ! » Dans la catégorie œillères, la tatoueuse de Kalie Art Tattoo range aussi les Beaux-Arts de Paris : un atelier, un maître – très peu pour la jeune femme.

Manuella est issue d’une école conceptuelle avec 5 maîtres, donc 5 regards différents : pour elle, « cela permet d’avoir une plus grande liberté individuelle ».

Un CAP pour le tatoueur ? Manuella répond par la négative. « Le CAP n’est pas assez complet comme formation, les tatoueurs […] devraient passer par une école d’art pour une perception plus large, pas seulement technique ». Avant de conclure : « après tout, on grave les gens à vie, et la technique ne fait pas tout… »