Explosion du nombre de salons de tatouage en France : l’exemple de Limoges

  
 

 

Demande croissante et manque d’encadrement : le nombre de salons de tatouage a explosé un peu partout en France. Exemple avec Limoges et la Haute-Vienne.

 

"Phénomène de mode", "appétit de consommation", "bouleversement" : Le Populaire du Centre ne mâche pas ses mots. Dans un article publié le 3 octobre 2018, le journaliste Julien Bigay rappelle pour le journal quotidien limousin que "18 % des Français déclarent être ou avoir déjà été tatoués" et que "la proportion de Français déclarant avoir fait l'expérience d'un tatouage a gagné 8 points depuis 2010". Ou la définition, ni péjorative, ni méliorative, mais purement factuelle, d’une "banalisation".

 

Et cette banalisation a de sérieux airs d’explosion à Limoges. Dans la ville de Nouvelle-Aquitaine "et dans le département de la Haute-Vienne en général", le tattoo "est en plein boom", écrit Le Popu. Cyril Marchand, fondateur de l’enseigne Art d’Corps, se confie au journal : "Nous étions 4 tatoueurs à Limoges quand j’ai ouvert il y a 17 ans. On compte 18 salons dans la ville aujourd’hui, dont 8 ont ouvert en 1 an !", s’exclame-t-il. Une autre professionnelle témoigne : "On est passé d'une dizaine en Haute-Vienne à près d'une centaine", dit Corinne Parée, de Black Line. Et de préciser dans la foulée : "Pour ne parler que des personnes qui déclarent leur activité"…

 

Dans un autre article publié le même jour, le même journal rappelle qu’aujourd’hui, "[la] formation en hygiène de 21 heures en poche, certains peuvent s’installer, sans aucune expérience". "Est-ce trop ?", questionne le journaliste. Cyril Marchand y voit du bon ("plus de concurrence peut amener plus de clients et tirer les tatoueurs vers le haut", estime le vieux briscard), mais aussi du mauvais ("Encore faut-il que la qualité soit au rendez-vous, et qu’on lutte à armes égales"). Car comme beaucoup, le Limougeaud déplore, "avec l'arrivée de nouvelles machines moins techniques à utiliser", la présence de "tatoueurs à 30 euros", improvisés à la manière des "coiffeurs à 10 euros". Un fléau montré du doigt par l’association Tatouage & Partage dans son récent appel à un code de déontologie.

 

"Comme dans d’autres métiers qui relèvent de l'artisanat, des différences fiscales ont été introduites avec la création du statut d’autoentrepreneur", souligne Julien Bigay. "Le poids des charges sur le prix d'un tatouage n'est en effet pas le même entre un salon employant plusieurs tatoueurs et une personne installée à son compte, ce qui peut faire une différence de 10 à 20 euros sur le prix final payé par le client", écrit le journaliste. Et Cyril Marchand d’interroger : "De façon générale, on peut se poser des questions sur le matériel et le respect de toutes les contraintes d’hygiène quand on se voit proposer un tarif de moins de 60 euros pour autre chose qu'un mini-tatouage".

 

Fabien Cibot encre aussi à Limoges et travaille, pour sa part, sous le statut d’autoentrepreneur. Questionné sur l’infrastructure qu’il a créée, il admet : "C'est vrai qu'il y a eu beaucoup d'installations mais je crois qu'il y a du travail pour tout le monde". Du travail "de pédagogie également", précise Le Populaire du Centre. Pourquoi ? Parce que du côté du tatoueur de Haute-Vienne, on constate que "souvent, les clients veulent tout, tout de suite. Ils arrivent avec la photo d'un tatouage sur leur téléphone, souvent sur Instagram, et demandent à repartir avec le même dessin".

 

"[Mais] on ne fait pas un tattoo pour la photo", rappelle Corinne Parée, confrontée à la même tendance. Pis encore : la tatoueuse a le sentiment que bien souvent, les clients "ne pensent pas au côté permanent du tatouage". Et vous, partagez-vous son ressenti ?