Tatoueuses, tatoueurs,
Les réactions allergiques ou infectieuses chez les clients sont la hantise de tout professionnel du tatouage. Mais cela arrive ! Surtout avec les encres rouges… Dans les cas où cela se produit, et que le client exige un responsable, il faut savoir quels sont vos droits et vos devoirs.
Priorité à la prévention
Il est prévu à l’article R1311-12 du code de la santé publique et dans un arrêté du 3 décembre 2008 (que je vous invite vivement à lire…) que le professionnel effectuant le tatouage doit informer son client de divers éléments avant d’effectuer l’opération. L’article 2 de cet arrêté précise les informations qui doivent être données oralement. L’annexe de cet arrêté quant à elle indique les informations qui doivent obligatoirement être affichées dans le shop ET remises par écrit au futur tatoué.
Il n’est pas précisé qu’un client déjà tatoué peut être dispensé de ces informations, ni qu’il y a une exception pour les shop privés. Il faut donc impérativement renouveler toutes ces informations à CHAQUE séance de tatouage.
Parmi les diverses informations qui doivent être données à l’oral, il y a en outre les risques d’infection ou d’allergie (le caractère définitif, aussi…). Afin de vous assurer un maximum de sécurité à ce niveau, je vous recommande de mentionner dans chaque courriel de réservation de rendez-vous, lorsque cela se fait par internet, les différentes informations qui doivent être transmises (en plus de l’oral et de l’écrit le jour du tatouage), afin de vous aménager une preuve de la transmission de l’information.
Si vous ne respectez pas ces obligations d’information, outre une sanction de l’Agence Régionale de Santé (ARS), un client ayant subi une infection ou une allergie pourra vous poursuivre en justice afin d’être indemnisé de son manque de chance de choisir en pleine connaissance de cause s’il allait ou non se faire tatouer. Le montant réparant ce « manque de chance » sera souverainement établi par le juge (au doigt mouillé, nous n’allons pas nous mentir…).
Qui est responsable ?
Il est de votre devoir de professionnels d’utiliser des produits de bonne qualité. Si un produit de mauvaise qualité, notamment une encre, cause une réaction allergique ou infectieuse à votre client, il pourra vous reprocher de n’avoir pas été suffisamment diligents dans le choix de vos produits. Au-delà de l’aspect juridique, bonjour la réputation qu’il va vous faire…
Pour cela, outre les conseils techniques qui vous sont donnés par Cap-Hygiène sur sa page Tatouage et Partage (à qui je n’oserai me substituer !), je peux vous indiquer que les produits de tatouage sont soumis à des normes spécifiques. Ainsi, vous devez absolument vous approvisionner en produits certifiés CE (les produits non certifiés sont tout simplement interdits de vente dans l’Union Européenne).
Acheter de tels produits vous permettra, en cas de complication pour un client, de lui indiquer le nom de votre vendeur. Ce dernier se chargera alors d’indiquer le nom de son producteur. Les produits CE garantissent leur traçabilité. Vous serez ainsi déchargés de toute responsabilité s’agissant de la qualité du produit, et il reviendra à votre client, aidé le cas échéant par la Justice, d’établir si le produit que vous avez acheté correspondait effectivement aux normes en vigueur et s’il n’était pas « défectueux ». Mais cela, ce n’est plus votre affaire.
En tout état de cause, si vous avez acheté de bonne foi un produit certifié CE, qui soit était un faux, soit ne respectait pas vraiment les normes de certification, vous serez protégés par la certification qui garantit que vous, vous avez fait les choses dans les règles. C’est la raison pour laquelle vous devez conserver un certain nombre de documents concernant vos produits et les étiqueter en fonction de vos clients, comme vous l’indique Cap-Hygiène dans leurs articles, auxquels je vous renvoie.
Cela étant, bien que vous ne soyez pas responsables de la défectuosité du produit, vous avez tout de même des obligations légales : si un produit que vous avez utilisé cause une allergie ou une infection, vous devez impérativement faire une déclaration d’effet indésirable à l’Agence Nationale de Santé et du Médicament (ANSM). Sans cette déclaration, et si d’autres produits du même lot que celui que vous avez utilisé cause d’autres infections ou allergies, vous en serez tenus responsable (d’où l’importance, encore une fois, de conserver les documents qui concernent la provenance des produits utilisés).
Autre hypothèse : une infection liée à un problème d’hygiène
Si un client est victime d’une réaction infectieuse qui est liée, non pas à un problème provenant d’un produit que vous utilisez, mais d’une erreur de votre part car vous n’auriez pas respecté les règles d’hygiène imposées dans la pratique du tatouage. Dans ce cas, il faudra assumer vos responsabilités et réparer le préjudice subi par votre client. Des assurances professionnelles existent pour cela, sans quoi il faudra le dédommager de votre poche. Si vous refusez, votre client sera en droit de vous attaquer en justice, et vous risquez d’avoir à payer, en plus des dommages et intérêts, des frais de procédure. Mais dans ce dernier cas, se posera la question de la preuve du non respect des règles d’hygiène. Il s’agit là d’une des formes d’inexécution contractuelle dont nous avons déjà parlé dans un article précédent (à lire ici).
Benoît Le Dévédec