Un projet de loi a été envoyé de la part du ministère de la Santé à Tatouage & Partage. Ce que notre association y a lu nous a inquiétés et inquiète un nombre croissant de tatoueurs en France. Ce projet de loi implique, s’il était adopté, que les tatoueurs de France, pour continuer à exercer légalement, devraient pouvoir justifier :
- soit d’une activité dans le tatouage depuis le 14 septembre 1989
- soit d’un diplôme (baccalauréat technologique, baccalauréat professionnel, brevet professionnel ou certificat d’aptitude) dans les métiers de l’esthétique
Après l’affaire des encres de tatouage en couleur en 2013, au cours de laquelle nous nous étions élevés avec succès contre leur interdiction sur le sol français, c’est donc un nouveau point de friction qui semble faire son apparition dans le paysage du tattoo français. Nous nous voulons toutefois rassurants et espérons de tout cœur que le gouvernement saura entendre, lors de notre entretien, tous nos arguments, grâce aux appuis politiques de Tatouage & Partage, ainsi que la médiation de Michel Jouinot, consultant qui nous avait soutenus lors de l’affaire des encres couleur.
Ici, une piqûre de rappel s’impose : à l’heure actuelle, la profession de tatoueur n’a tout simplement aucune existence légale en France. Cette situation ne peut plus durer : il nous apparait comme impératif de définir un statut clair pour les tatoueurs français. Pour ce faire, il faut fixer avec la plus grande clarté, main dans la main avec l’Etat :
- un cadre juridique
- une fiscalité
Aujourd’hui, Tatouage & Partage souhaite que la profession soit encadrée de la meilleure manière avec l’obtention d’un statut juridique qui lui permettrait à la fois de bénéficier enfin d’une assurance professionnelle, mais également :
- de pouvoir donner un statut aux conjoints travaillant avec ces mêmes tatoueurs
- de prendre des apprentis en toute légalité
- de jouir d’un cadre santé dans lequel évoluer qui soit sûr pour les clients et facile à mettre en place pour les tatoueurs
Autre conséquence de l’inexistence d’un statut propre aux professionnels du tatouage : en l’état actuel, les aspirants tatoueurs ne peuvent tout simplement pas recevoir une formation cadrée et sanctionnée par un diplôme. De cela découlent forcément des abus, des deux côtés du spectre :
- des apprentis peu consciencieux qui ne rejoignent leur studio de tatouage qu’épisodiquement
- des responsables de studio qui engagent des apprentis plus pour faire le ménage et s’occuper d’autres basses œuvres que pour véritablement leur apprendre à tatouer
En plus de ce mode d’apprentissage non réglementé et, de fait, hautement problématique, on distingue trois types de « formation » permettant d’exercer le métier de tatoueur en France. Le premier est une formation de 21 heures à l’hygiène, formation déclarée obligatoire par la loi pour tatouer, mais inadaptée aux véritables besoins des tatoueurs. Pourquoi inadaptée ? Parce qu’elle ne valide aucun acquis professionnel du tatouage. En d’autres termes, il suffit de pouvoir justifier de ces 21 heures pour entrer sur le marché du travail comme tatoueur.
Le troisième type – de loin le plus répandu – est ce que le langage courant nomme les scratcheurs, et ce que d’autres appellent les tatoueurs clandestins. Le terme de scratcheur, dénigrant, est parfois utilisé de manière abusive : ces tatoueurs, par définition autodidactes, ont appris le métier chez eux ou hors des studios, et font preuve, pour certains, d’un très grand talent. Ils sont la manifestation d’un mal propre au tattoo français : ceux qu’on a poussés vers la clandestinité, faute de cadre juridique adapté.
Aujourd’hui, nos préconisations demeurent plus claires que jamais :
- Nous demandons la mise en place d’une école ou d’une formation officielles de 2 ans minimum en alternance. Par alternance, nous entendons des modules théoriques en cours (dessins, dermatologie, informatique, histoire de l’art…) couplés à des modules pratiques à réaliser chez un tatoueur professionnel.
- Nous demandons un véritable statut juridique pour les tatoueurs de France, inspiré du statut d’artisan d’art par exemple.
- Nous demandons une équivalence pour les très nombreux tatoueurs exerçant actuellement en France sans diplôme en esthétique, et qui ont commencé leur activité après 1989.